mercredi 7 décembre 2011

Pour Bela Tarr

Si, selon Robert Bresson, « un film n'est pas fait pour une promenade des yeux, mais pour y pénétrer, y être absorbé tout entier », alors Le Cheval de Turin, du hongrois Bela Tarr, est un film. Je vous conjure d’aller le voir. Peut-être n’aimerez-vous pas. Il se peut que, comme certains des spectateurs dans la salle, vous rigoliez, ou pestiez devant ce qui vous semblera être « du snobisme » (1). Peut-être, par moment, trouverez-vous le temps long ; peut-être la radicalité simple de l’esthétique du film vous déconcertera. Cela a été, à de rares moments, mon cas. Il n’empêche. Il n’empêche que l’expérience que vous vivrez, si seulement vous voulez bien accepter que le cinéma ne soit pur divertissement, si vous admettez qu’un plan peut durer plus de 10 ou 20 secondes, sera durable. La radicalité, sous quelque forme que ce soit, a cet inconvénient d’être difficile à saisir, à cerner ; mais alors, quand nous faisons l’effort de la comprendre, alors nous touchons du doigt une expérience qui dépasse notre petit moi et notre petit plaisir immédiat. Excluant la facilité, ne touchant que ceux qui veulent bien être touchés par la grâce, ne cherchant pas à être aimée de tous – mais ne le refusant pas nécessairement -, la radicalité, paradoxalement, confine parfois à l’expérience universelle. Le but n’est pas forcément, ici, d’éprouver un plaisir immédiat – quoique cela soit possible - ; il se peut que nous n’aimions pas, que nous y trouvions à redire. Mais ne pas s’y frotter relève de l’inconscience.




Alors, je vous en prie, allez voir Le Cheval de Turin, du hongrois Bela Tarr.



1) Spectateur dans la salle du MK2 Rambuteau, Paris, le dimanche 4 décembre à 16h58

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