samedi 15 septembre 2012

La photographie contemporaine a-t-elle une histoire ? (1)

A cette question d’apparence un peu banale, M. Poivert trouve une réponse intéressante en considérant que ce qu’on appelle la photographie contemporaine, et la période où l’on a trouvé cette dénomination pour la photographie, correspond au fait que la photographie trouve aujourd’hui sa plus grande actualité dans son rapport à l’art, et notamment à l’art contemporain. Il souligne avec justesse que la photographie a d’autres fois trouvé son actualité dans d’autres rapports : dans ses liens avec l’information, la science, l’industrie… Mais voilà, depuis 1970, la photographie s’épanouit dans l’art contemporain.  

Vik Muniz
 Après avoir historicisé cette entrée en art, il en tire les conclusions qui s’imposent : si la photographie contemporaine n’est qu’une époque de la photographie, si cette époque a commencé il y a plus de 40 ans, il est logique qu’elle finisse un jour et que la photographie trouve son actualité dans un autre rapport. Ce temps est venu, pour M. Poivert, qui déclare que « les choses sont clairement engagées aujourd’hui du côté d’une « sortie » de l’art contemporain ».

L’histoire, l’histoire de la photographie et plus précisément encore l’histoire de la photographie contemporaine ainsi comprise serait l’outil par lequel la photographie pourrait se poursuivre ailleurs, par lequel elle immortaliserait cette période de son histoire. Cette histoire, qui reste encore à écrire, serait l’histoire commune de l’art et de la photographie. Pour la penser, il faudrait reprendre les rapports complexes que ces deux disciplines ont entretenus dès avant le tournant des années 80, pour ne pas dire depuis le XIXème siècle.           
Marcel Duchamp - La mariée mise à nu par les célibataires, même

Pendant longtemps, et cela prend racine dans de nombreux débats qui agitèrent ce siècle, la photographie a été pour l’art un contre-modèle : la mimétique contre la liberté, la trivialité du reproductible contre la singularité du génie…           

Au début du XXème siècle, et en particulier par l’entremise de personnalités dadaïstes comme Picabia ou Duchamp, ce contre-modèle est retourné contre l’art lui-même pour en développer la profondeur esthétique et provocatrice. Prend alors naissance un art en négatif, « sans style, sans émotion, sans effort, sans original »… C’est l’arrivée d’un art sans aura que l’on connait bien aujourd’hui. 

Ce chemin s’établit en parallèle d’une autre histoire qui reste, pour sa part, propre à la photographie : c’est la photographie artistique, qui acquiert à la suite du pictorialisme anglo-saxon, une légitimation progressive. Ce qui est particulièrement étonnant, c’est de constater à quel point ces deux histoires s’opposent point par point et sont comme le reflet inversé l’une de l’autre. C’est ce que l’auteur appelle la « tension progressive entre le statut artistique et la puissance esthétique ». Il cite alors Walker Evans en 1947 : « La photographie n’a absolument rien à voir avec « l’Art ». Mais elle est précisément un art pour cela. »
Walker Evans

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